Article publié le 19 mai 2025.
Sous les pavés, des carrières.
Derrière ce matériau blanc, discret et presque banal, se cache un minéral unique : le gypse.
Connu depuis l’Antiquité, il est extrait dès le Moyen Âge sous Montmartre, Belleville ou les Buttes-Chaumont, puis transformé par les plâtriers.
Au fil du temps, il a façonné l’histoire et l’architecture de Paris, jusqu’à s’infiltrer au cœur même de son identité.
Emplâtrer Paris !
Sur les façades comme dans les intérieurs, le plâtre modèle, protège, sublime et devient un matériau incontournable de l’habitat parisien.
Mais, en 1667, sous ordonnance royale, il prend une tout autre dimension : cette décision, Paris la doit à Londres.
Un an plus tôt, un incendie dévastateur avait ravagé la capitale anglaise, détruisant plus de 13 000 maisons et 87 églises.
Soucieux d’éviter une telle tragédie, Louis XIV consulte ses urbanistes. Leur verdict est sans appel : compte tenu de l’abondance du gypse en Île-de-France et de ses propriétés ignifuges, seul le plâtre peut protéger Paris du feu.
Le roi décide alors de rendre son usage obligatoire. Paris est emplâtré, pour sa survie.
« Nos pères avaient un Paris de pierre ; nos fils auront un Paris de plâtre. »
Victor Hugo
L’usage massif du plâtre a un prix.
À force d’extraire le gypse, les carrières fragilisent le sol et des rues s’effondrent.
Face à l’urgence, Louis XVI crée en 1777 l’Inspection générale des carrières, chargée de cartographier le sous-sol devenu menaçant.
En 1881, la population de Paris a quadruplé depuis 1800 et absorbe de nouveaux faubourgs.
Victor Hugo s’alarme dans son ouvrage Notre-Dame de Paris : «Les monuments y deviennent de plus en plus rares, et il semble qu’on les voie s’engloutir peu à peu, noyés dans les maisons. Nos pères avaient un Paris de pierre ; nos fils auront un Paris de plâtre.»
Un héritage qui bâtit encore.
Si le plâtre moulé brille dans les salons et les musées, témoins du génie français, ce sont sur les façades enduites de plâtre, façonnées entre le XVIIᵉ et le milieu du XXᵉ siècle, que près de la moitié des bâtiments parisiens et une grande partie du patrimoine bâti d’Île-de-France racontent, en silence, l’histoire intime entre Paris et le gypse.
Aujourd’hui, Saint-Gobain, leader mondial du secteur, et sa filiale Placoplatre, créatrice du célèbre « placo », prolongent ce lien séculaire.
À Vaujours (Seine-Saint-Denis), Placoplatre exploite la plus grande usine de plaques de plâtre d’Europe et puise sa matière dans deux carrières emblématiques d’Île-de-France : Cormeilles-en-Parisis (Val d’Oise), dont la pureté exceptionnelle du gypse assure 60 % du plâtre exporté par la France, et Montmorency (Val d’Oise), la plus vaste carrière souterraine d’Europe, classée Projet d’Intérêt Général depuis 1999 en raison de son importance stratégique.
Sources :
https://www.histoires-de-paris.fr/recit-carrieres-platre-charles-sellier/
https://immobilier.lefigaro.fr/article/le-saviez-vous-la-moitie-de-la-ville-de-paris-est-en-platre_eb5d32de-07ac-11e6-b343-ee4e2863feef/
https://fr.wikipedia.org/wiki/Rue_des_Chaufourniers
https://www.espazium.ch/fr/actualites/le-platre-ce-bon-rien-si-extraordinaire
https://theses.hal.science/tel-02067379v1/file/71311_LE_DANTEC_2019_archivage.pdf